Fantôme de paupières

Publié le par Lettres à l'amer

Je ferme mes yeux, et je vois les tiens. L'image est imprimée bien nette derrière mes paupières. Mes bras sont persuadés que tu y es encore, drôle d'oiseau perché.

A l'aise, tu fais ton nid. Plantée là, comme un étendard en territoire conquis, une douce odeur de tabac que je n'ai jamais invitée. Entre les draps, le parfum est plus riche : fruité et opulent.

Je me souviens ce jour où tu jonglais avec mes mots, agile et souple. Tu les attrapais avec précision, les faisais tournoyer, et puis tu me les relançais. Expérience habile, surprenante, enrichissante. Un simple jeu pour s'apprivoiser, même si j'ai peur d'y laisser des plumes.

Dans mon écrin de verre, je succomberais au murmure d'une simple brise. Quand elle souffle, je frissonne, et j'oublie l'eau dehors. De toute façon, j'ai fondu, comme les glaces du pôle Nord, mais si tu veux, j'ai encore de la place pour toi.

Doux spectre qui surprend mon regard. Tu hantes cette alcôve que je m'étonne de construire, un petit coin tendre et clair où la vérité ne blesse plus. La lueur d'un jour neuf réchauffe l'endroit sans t'éveiller ; ce n'est rien, tu es ici chez toi, et je peux bien t'attendre quelques heures.

Publié dans Portraits liquides

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